Jour 1 – À la rencontre de mon projet d’écriture

Le jour se lève doucement sur Cap-Chat. Ce matin, c’est Louise qui anime le tout premier atelier. Sa voix, douce et enjouée, me guide dans un espace de calme et de clarté. Mon corps se détend. Mon mental ralentit. Je respire.

Et dans cette tranquillité, une voix intérieure me souffle :
« C’est le moment. Écris ton roman. »

Je résiste. Je suis ici pour organiser, tenir l’espace, accompagner les autres. J’ai même traîné ma to-do liste pour boucler des mandats avant l’été. Mais cette petite voix ne me lâche pas. Et dans le silence, une présence familière m’envahit.

Sophie.
Mon amie partie trop tôt. Deux ans presque jour pour jour. Elle est là. Discrète. Silencieuse. Lumineuse.
Et c’est comme si elle murmurait, elle aussi :
« C’est maintenant. Pour toi. »

Après l’atelier, je m’installe à la grande table extérieure. J’essaie d’écrire. Rien ne vient. La page blanche me nargue. Je respire. Et je me laisse distraire par le quotidien : c’est l’heure de préparer le dîner.

Pendant que je cuisine, je regarde à travers la fenêtre : le phare, toujours là, et un campeur installé tout près, dans une tente blanche. Et là, nouveau murmure intérieur :
« Ton roman ne sera pas celui que tu avais prévu. »

Je souris. Peut-être que ce ne sera pas un essai sur le développement personnel, mais une romance douce et sauvage, à l’image de mon cœur bohème.

Après le repas, je pars marcher. Le soleil, le vent, la mer, tout m’inspire. Une scène sensuelle m’apparaît, sortie de nulle part. Mais la réalité me ramène doucement à moi : je retourne à la maison du gardien du phare, il est temps de me connecter avec une de mes complices, notre participante virtuelle.

L’atelier commence. elle nous invite à créer un personnage à partir de nos parts d’ombre et de lumière. Je m’installe face à la mer, carnet en main.

Et elle naît :
Bulle de peur, une femme qui semble avoir tout pour réussir, mais qui s’enferme dans une cage nommée culpabilité. Elle rêve de liberté, mais reste figée par la peur du regard des autres, le poids des conventions. Elle respecte des règles auxquelles elle ne croit plus.

Au fil de l’écriture, les masques tombent.
Peur du jugement. Peur de déplaire. Peur d’être rejetée.
Je me rends compte que ce personnage, c’est moi. Ou plutôt, une partie de moi que je suis prête à libérer.

Par les mots, je retire le costume de la « fille aux 1001 projets », celui de « Miss parfaite ». Je respire plus librement. Je suis en train de renaître.

Le soir venu, on partage une pizza maison autour d’une table à pique-nique. Puis, on se dirige vers la plage. Assises sur une branche de bois flotté, on observe le coucher du soleil. La mer s’étire à l’infini. Au loin, les éoliennes tournent sur la montagne.

Et tout en moi murmure…
Tu es de retour. Chez toi. Dans ton cœur. Et dans ta plume.